14 Novembre 2017
Le paysage de mon adolescence fut un internat de lycée de garçons. J’y passai sept années. Aujourd’hui, elles me semblent légères et insouciantes. L’étaient-elles vraiment ? Il est probable que la mémoire me joue des tours.
J’en ai gardé un goût prononcé pour la mauvaise musique, la littérature de calembours, la gastronomie de réfectoire, l’obéissance paresseuse, les colères étouffées que je savais si bien muer en bouderies, les vastes éclats de rires irraisonnés et bruyants.
Je n’en sortis pas tout à fait bon à rien puisque je m'y forgeai une vocation de tisserin* qui ne m’a jamais lâché depuis.
Il me fallut attendre encore un peu pour découvrir les filles que j’ignorais sincèrement jusqu’alors et qui me le rendaient bien. La première qui m’embrassa – elle s’appelait Françou – mit en évidence l’ampleur du retard que j’avais pris.
* Le tisserin est un oiseau d'Afrique qui s'agite beaucoup et assemble tout ce qu'il trouve en constructions inutiles. Dans une situation qui lui est intolérable, il fait subitement preuve d’un détachement total et s’évade complètement du monde extérieur devenu momentanément odieux…