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Des humeurs et des jours

Anachroniques contemporaines

Aridités

 

N’importe quoi… Cette écriture récalcitrante…
Ça m’arrive parfois, je reçois des textes de commande : un édito, une préface pour un livre que je n’ai pas lu et que quelqu’un d’autre signera, un projet de discours…
Là, c’était en 2012 : il fallait que je ponde un texte « intelligent et sensible » (sic) sur les chemins de Saint-Jacques de Compostelle et ma plume est restée sèche. Surgissaient, par hoquets, que des phrases banales, sans musicalité… Que tout cela était pauvre et inutile ! L’évidence était qu’il me fallait renoncer, dire tout simplement que je ne pouvais pas, que je ne savais pas… Alors, par dépit, je me suis blotti dans le silence et mon commanditaire ne m’a pas relancé…
Mais – et c’est un de ces mystères que je porte en moi et qui m’étonnent parfois un peu – je sentais confusément que je refusais mon refus.

2022. Dix ans après…Je me bloque sur mon bureau à griffonner des mots, des mots, des mots qui portent sur le chemin… Me reviennent en mémoire quelques bribes de Caminante d’Antonio Machado : 

Caminante, son tus huellas
el camino y nada más;
caminante, no hay camino,
se hace camino al andar.

Alors, par la vertu de la poésie – ultime refuge pour un esprit en paresse – j’ai laissé glisser ma plume jusqu’à ce que vienne la phrase initiale. Et ça sera le titre : 

« Les Errantes – à la recherche des temps éperdus »

 Ça me convient, je sens que cette piste sera fertile. Mon projet prend corps : je le formule en termes de défi. Improbable : écrire et penser comme si j’étais une femme. Ecrire et penser contre moi-même, en évacuant mes réflexes de rédaction qui disent si fort que je suis un homme…
Tenter de faire un roman féminin – pas féministe – qui soit une méditation sur des destins incertains.
Pour cela, miser sur l’errance. L’errance tout au long des 30 étapes de via Podiensis, du Puy-en-Velay à Roncevaux, de dix femmes qui, au fur et à mesure du trajet se racontent et se révèlent.
Ce sera un kaléidoscope de récits, de conversations, d’écrits (correspondances, carnet de voyage…), de monologues intérieurs et souvent, des bruits et des silences que l’on trouve dans ces lieux qui sont tour à tour bavards et énigmatiques.
Chaque femme porte en elle une blessure que le chemin, avec ses épuisements et ses lenteurs inexprimables, cicatrisera en secret.

Aujourd’hui, 250 pages après, le livre est terminé. Il m’a pris six mois. J’en suis à la phase relecture et correction. Je ne vais pas le proposer à l’éditeur qui me l’avait commandé il y a dix ans : il est mort. J’en ferai une autoédition en fin d’année.
 

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