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Des humeurs et des jours

Anachroniques contemporaines

La musaraigne

Comme nous, Myrtille est confinée, mais comme pour nous le confinement de Myrtille est une solitude approximative.
Observons-là… Myrtille ressemble à une musaraigne. Museau pointu, œil noir et vif, corps petit et souple, agité de soubresauts qui ne cessent jamais… Elle trottine de toute l’énergie de ses menues pattes et, dès qu’un tout léger petit bruit la surprend, elle file, vite, vite sur réfugier dans son refuge : le lit de sa chambre. On dirait un très léger nuage de musaraigne, notre Myrtille apeurée. Mais qu’on ne s’y trompe pas ! Sitôt le calme revenu, la musaraigne ressort de son lit et glisse tout aussitôt son nez aigu à l’entrebâillement de la fenêtre qui donne sur la rue… Jamais, elle ne reste tranquille.
Pascal devait penser à elle lorsqu’il écrivit : « Tout le malheur de l’homme (et donc de Musaraigne) vient d’une seule chose, qui est de ne savoir pas demeurer en repos dans une chambre. »
Les murs de la chambre de Myrtille la protègent du froid d’hiver, des vents, de la pluie et des touffeurs d’été. Mais on dirait qu’ils forment une cellule percée d’invisibles orifices où, par flux continue, le bavardage du monde s’insinue et assourdit. C’est comme si le social s’était donné pour mission de détruire l’intime. Tout cela exaspère Myrtille.
Elle tente bien de se raisonner, pensant à sa vie quotidienne, lorsqu’elle va travailler : « Ces jours d’enfermement ne  doivent pas m’exaspérer. Nous sommes tous tellement accoutumés à cette vie de bocal : le bureau, la voiture, les embouteillages, les files d’attentes… tout ça ce sont des bocaux aux parois invisibles mais tellement prégnantes… Au final ma liberté n’est que celle d’un poisson rouge dans son aquarium… »
La musaraigne devenue poisson ! Bigre… l’affaire se complique ! 
D’ailleurs, au fil des jours de ce faux confinement, Myrtille vit son humeur peu à peu s’aigrir. Elle n’arrivait plus à contenir ces fantômes qui erraient mystérieusement en elle… L’exaspération, l’ennui, puis la peur… Tout était sentiment de vulnérabilité et de vacuité… 
Surgit une obsession : « Je veux quelqu’un près de moi, tout près de moi, quelqu’un qui m’écoute… quelqu’un qui ait ce si rare talent de savoir écouter, sans vouloir répondre, la voix maladroite d’une fille qui cherche maladroitement les mots qui disent la désespérance, la très banale désespérance… » 
 

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